Le rapport au travail change. Et ce, au point qu’aux Etats-Unis, on pouvait, par exemple, lire sur les portes de nombreux restaurants : « Désolé pour l’attente, les gens ne veulent plus travailler. » Ce phénomène sera désigné par la presse sous l’expression un « tsunami de démissions ». Pour Frantz Gault, cet état de fait relève moins de la paresse que d’un ras le bol… Ainsi peut-il écrire : « Une tension semble donc s’installer dans le monde du travail ; une tension dont le tsunami de démissions serait le symptôme et qui serait causée, pêle-mêle, par une mauvaise répartition des richesses, par une maltraitance endémique, par une précarisation rampante et un sentiment croissant d’injustice sociale. »
Mais au-delà de ces raisons fort compréhensibles, il note que de plus en plus de personnes ayant vécu la pandémie et la suite de confinements, prennent du recul relativement à leur travail. Et ce faisant, s’interrogent sur le sens de leur vie et aspirent à vivre de manière plus simple.
C’est cette veine qu’Apocalypse work se propose d’explorer.
En empruntant la voie d’un questionnement à la croisée de la philosophie et de l’anthropologie, ce court et passionnant essai problématise la réalité du travail selon trois grands thèmes : la liberté, le pouvoir et le sens. Si, pour l’auteur, le « totalitarisme du travail » ne s’est pas infléchi, la capacité de régulation dévolue au dialogue social n’a cessé, depuis les lois Auroux, de s’étendre en France.
Après un bref panorama de ce qu’il nomme « les vicissitudes de la démocratie au travail », l’auteur s’attarde sur les dernières tendances qui « visent à réinventer l’organisation en renforçant la participation directe (mais informelle) des salariés à l’organisation du travail. » Sociocratie, holacratie, entreprise libérée …
La question du sens du travail, véritable sujet du livre, est in fine posée. Malgré ses promesses de lendemains qui chantent, le travail, régi selon les lois du productivisme et du capitalisme prédateur, laisse derrière nous une planète en très mauvaise état et une crise climatique pourvoyeuse de catastrophes. A ce propos, l’auteur cite Marx pour qui « la nature était « indissolublement liée à l’homme car celui-ci est une partie de la nature » et que « les faits nous rappellent à chaque instant que nous ne régnons nullement sur la nature comme un conquérant règne sur un peuple étranger. » Apocalypse Work, un essai qui, dans les conditions de ce début de 21e siècle, interroge autant le travail qu’il questionne le progrès avec l’objectif de redonner, à l’un comme à l’autre, une visée émancipatrice.
Apocalypse work, Frantz Gault, postface de Grégoire Epitalon, édition Dunod, 144 pages, 14,90 euros.
Image par Malachi Witt de Pixabay
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