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Droit

Durée du chômage partiel et reprise d’activité

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5 mai 2020

Par Émilie Gasté, avocate au Barreau de Paris.

Lire notre avertissement : https://bit.ly/3a2fgEE

« Dans une entreprise d’insertion de Poitiers, le Directeur a remis tout le monde au boulot sous prétexte que le chômage partiel ce n’était que 14 jours maxi ! Est ce vrai ? »

Le chômage partiel : pour combien de temps ?

La loi ne limite pas le « chômage partiel » à 14 jours. En revanche, l’employeur peut décider d’y recourir pendant une courte période, compte tenu de la finalité du dispositif qui porte désormais le nom d’« activité partielle ».

En synthèse, l’activité partielle, prévue à l’article L. 5122-1 du Code du travail :

  • est un régime d’aide aux entreprisesqui font face à des baisses d’activité en raison notamment de difficultés économiques conjoncturelles ou de circonstances exceptionnelles,
  • qui a pour objectif de préserver les emplois par la mise en œuvre d’une réduction du temps de travail, qui peut se traduire par une diminution des horaires de travail ou par la fermeture temporaire de tout ou partie d’un établissement.

Le salarié reçoit de l’employeur une indemnité équivalente à 70 % de sa rémunération horaire brute pour chaque heure chômée, ce qui représente environ 84 % du salaire net d’activité. Pour les salariés payés au SMIC l’indemnité couvre 100 % du salaire net. L’entreprise reçoit, pour sa part, une allocation pour toute heure indemnisée, financée à hauteur d’un tiers par l’UNEDIC et de deux tiers par l’État.

L’entreprise doit être autorisée à recourir à l’activité partielle et déposer une demande en ce sens auprès de l’administration. En application de l’article R. 5122-2 du Code du travail, cette demande précise les motifs qui justifient le recours à l’activité partielle, la période prévisible de sous-activité et le nombre de salariés concernés. Elle est accompagnée de l’avis du comité social et économique (CSE).

Depuis le décret n°2020-325 du 25 mars 2020, qui a modifié l’article R. 5122-9 du Code du travail, l’autorisation peut être accordée pour une durée maximum de 12 mois. Jusque-là, cette durée était de 6 mois. Ces durées sont renouvelables.

Ce même décret a, par ailleurs, porté le montant de l’allocation reçue par l’employeur à 70 % de la rémunération brute horaire, limitée à 4,5 fois le taux horaire du SMIC. En pratique, cela signifie que pour tous les salariés dont la rémunération est inférieure à 4,5 SMIC, l’entreprise n’a pas de reste à charge, alors qu’elle recevait auparavant un montant forfaitaire de 7,74 € et de 7,23 € dans les entreprises de plus de 250 salariés. Les annonces gouvernementales des derniers jours semblent toutefois indiquer qu’à partir du 1er juin prochain, le taux de prise en charge en faveur des entreprises pourrait être revu à la baisse.

Il existe, en outre, un contingent annuel d’heures indemnisables, en principe de 1.000 heures par salarié. Un arrêté du 31 mars 2020 a cependant porté ce contingent à 1.607 heures pour l’année 2020.

La possibilité de recourir à l’activité partielle est donc loin d’être limitée à 14 jours et peut couvrir, en 2020, jusqu’à l’équivalent d’une année non travaillée d’un salarié à 35 heures.

En théorie cependant.

En effet, même en période de crise sanitaire, l’employeur n’est pas dispensé de justifier de motifs sérieux pour placer ses salariés en activité partielle et solliciter, à cette occasion, le soutien de l’Etat et de l’UNEDIC.

De plus, les durées et contingents réglementaires ne sont jamais que des maxima. Chaque entreprise doit évaluer la durée prévisible de mise en activité partielle et le volume d’heures sollicitées pour un nombre déterminé de salariés en fonction de la baisse d’activité qu’elle subit.

Votre employeur a ainsi pu déposer une demande d’autorisation de recours à l’activité partielle pour une courte période de 14 jours nécessaire pour réorganiser l’activité et l’adapter aux circonstances sanitaires, ce qui expliquerait alors sa réponse. Si un CSE existe dans l’entreprise, cette information peut être vérifiée auprès des membres de cette instance, dont la consultation est obligatoire. En l’absence de représentant du personnel, vous pouvez interroger votre employeur puisque ce dernier doit, dans ce cas, informer directement les salariés de sa décision de recourir à l’activité partielle et préciser notamment la durée prévisionnelle envisagée.

La reprise du travail : mais à quelles conditions ?

Au-delà, votre question pose sans doute celle des préoccupations légitimes que soulèvent la reprise du travail, après quelques jours seulement d’activité partielle, en période d’urgence sanitaire et de confinement de la population.

Une entreprise d’insertion, sous réserve que son activité ne soit pas directement visée par les arrêtés des 14 et 15 mars 2020 qui ont fixé la liste des établissements et commerces qui ne peuvent plus recevoir de public, peut a priori demander à ses salariés de reprendre le travail, même avant le « déconfinement ».

L’employeur a cependant l’obligation, au préalable, d’évaluer les risques pour la santé et la sécurité des salariés, de prendre toutes les mesures de prévention qu’imposent les circonstances sanitaires et d’organiser le travail pour garantir notamment le respect des gestes barrière et des mesures de distanciation sociale (articles L. 4121-1 et suivants du Code du travail). L’entreprise est également tenue de fournir les équipements de protection adaptés et de mettre à jour le document unique d’évaluation des risques ou DUER (articles R. 4121-1 et suivants du Code du travail), que vous pouvez demander à consulter.

Le CSE, lorsqu’il existe, doit être associé à la démarche d’évaluation et de prévention des risques, ce que plusieurs juridictions ont récemment rappelé (Cour d’appel de Versailles, 24 avril 2020, RG n° 20/00503 ; société Amazon France Logistique c/ Union syndicale Solidaires et autres ; Tribunal judiciaire de Lille, 24 avril 2020, RG n° 20/00395, syndicat CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services c/ société Carrefour hypermarchés).

Le site du Ministère du travail présente également des « fiches conseils métiers et guides pour les salariés et les employeurs », sous forme de fiches pratiques établies avec le concours d’organismes tels que l’Assurance Maladie, l’INRS, l’ANACT ou encore des médecins du travail, et qui peuvent être consultées en suivant le lien : https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/proteger-les-travailleurs/article/fiches-conseils-metiers-et-guides-pour-les-salaries-et-les-employeurs

Enfin, la reprise de l’activité ne peut être imposée lorsque le salarié est dans l’impossibilité de travailler pour l’un des motifs suivants :

  • personne vulnérable qui présente un risque de développer une forme grave d’infection au covid-19,
  • personne qui partage le même domicile qu’une personne vulnérable,
  • parent d’un enfant de moins de seize ans ou d’une personne en situation de handicap, dont l’établissement scolaire ou d’accueil est fermé, et qui ne dispose pas d’autre solution de garde.

Les salariés concernés seront placés, à compter du 1er mai 2020, en position d’activité partielle. L’article 20 de laLoi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020, qui prévoit l’entrée dans ce dispositif, met ainsi un terme aux arrêts de travail dits « dérogatoires » qui donnaient lieu au versement d’indemnités journalières de sécurité sociale et à un maintien de salaire par l’employeur selon les règles, légales ou conventionnelles, applicables dans l’entreprise. Désormais, l’indemnisation sera celle de l’activité partielle.

Un décret, non publié au moment de la rédaction de ces lignes, doit encore préciser les modalités du dispositif dans ces situations particulières.

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