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Ce que « l’externalisation » fait au travail

Christine Depigny-Huet de la Compagnie Pourquoi se lever le matin !

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Lu dans TaF n°7 : nettoyage sous-traité, salariées malmenées. Invisibilisées par leurs horaires, elles sont moins payées, moins protégées, et elles travaillent plus. On nous dit « qu’on n’a pas le choix ». La novlangue diffuse le dogme du « recentrage sur notre cœur de métier ». Les organisations sont chamboulées, le travail aussi. Tant pour les prestataires que pour les salariés du donneur d’ordre. La fonction publique n’est pas épargnée.

Qu’est-ce que cela fait à leur travail ? Qu’en disent les narrateurs des récits publiés par la Compagnie ?

Comment inventer l’enseignement à distance sans partager avec des collègues ?

Pour assurer les cours, l’université de Sophie a recruté cent-trente vacataires, près du tiers des effectifs enseignants. Avec le premier confinement sa charge de travail a plus que doublé pour garder le lien, vérifier que les étudiants progressent, les faire travailler ensemble, les encourager….Elle l’a fait seule « je ne sais pas comment font les autres enseignants », « l’absence de coordination d’équipe rend difficile le travail avec les étudiants ». Néanmoins « on me demande régulièrement de rendre compte de ce que je fais et de ce que je demande aux étudiants ». Pour l’évaluation : « je vais devoir inventer un autre mode de restitution et de notation ». Alors qu’elle se démenait avec les étudiants, l’université a annoncé aux vacataires qu’ils ne seraient pas payés tant que la situation ne serait pas revenue à la normale. Finalement ils ont payé … les trois heures hebdomadaires prévues au contrat. Contrat pour lequel on lui a d’ailleurs proposé de s’établir auto-entrepreneuse … pour faciliter le travail des personnes gérant les contrats des vacataires.

Comment coordonner les activités ?

Pour Michel, aide-soignant dans un hôpital d’Ile de France, « la politique de l’hôpital c’est depuis des années de sous-traiter des services à des boîtes privées. Elles sont sélectionnées sur appel d’offres pour cinq ans et au bout du contrat ce sont d’autres qui interviennent. On voit donc arriver des employés qui ne connaissent pas les lieux et du coup il ne faut plus s’étonner des retards. Récemment, il a fallu près de trois semaines pour que la climatisation soit réparée alors qu’il faisait 29° dans les chambres. Avant, nous avions un technicien soumis à des astreintes qui connaissait par cœur notre équipement, mais la direction n’a pas su le garder. C’est à terme ce qui risque de se passer pour le biomédical. L’externalisation crée des problèmes de coordination qui ne sont pas pris en compte par la direction. »

Peut-on s’organiser entre prestataires et titulaires, tisser des liens professionnels ?

Dans le service de Philippe, réanimateur en chirurgie cardiaque « Il n’y a carrément plus d’agent de service à la réanimation. Le nettoyage est fait par une entreprise privée. Nous nous sommes beaucoup bagarrés pour améliorer les conditions de travail de la personne chargée de l’entretien de nos locaux. Elle avait des horaires horribles, commençait à quatre heures du matin, et son petit chef ne supportait pas que nous lui parlions et lui offrions le café. On a fini par gagner, elle a des horaires normaux, en journée, et même si elle travaille aussi dans d’autres réanimations, elle est intégrée chez nous et on a pu créer des liens avec elle pour le ménage. »

La plate-forme numérique serait-elle le summum de l’externalisation ?

« Nous tenons à ce que les secrétaires soient intégrées au travail de l’équipe (de réanimation). Malheureusement, on n’en embauche plus depuis l’introduction de l’application Doctolib … qui, contrairement à une secrétaire, n’intègre pas notre manière fine de travailler. C’est une catastrophe pour l’organisation de mes consultations préopératoires : cette application ne sait pas que j’ai besoin de plus ou moins de temps selon les malades, selon la nature de leur opération, selon qu’ils sont déjà à l’hôpital ou pas. » Mais, comme le dit Philippe : « Vu « d’en haut », du moment qu’on opère les gens, tout va bien ».

Et la démocratie dans tout cela ?

Pour Yves, militant au comité pour la défense de l’hôpital de Douarnenez, les usagers ont du mal à obtenir les informations de gestion. C’est un aspect important dans son activité militante. « Nous sommes très vigilants sur ces questions de privatisation. Ce n’est pas seulement la mise en concurrence des établissements, il y a aussi de la privatisation par l’intérieur. C’est le cas avec Happytal, une société de conciergerie, privée, implantée dans les locaux de l’hôpital public. Ils ont répondu à un appel d’offres, lancé par un groupement d’achat des hôpitaux et maintenant, par exemple, ce sont eux qui gèrent les chambres individuelles … je compte bien demander un bilan au bout d’un an, ne serait-ce que sur les aspects financiers ». 

Si vous aussi vous avez des exemples de ce que l’externalisation fait, concrètement, au travail, alors contactez-nous. Nous pourrions en faire le récit ensemble.

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